Par Charles Mapinduzi
Jusqu’ici, ils étaient au point mort. Mais, préoccupée par un atterrissage en douceur, la Communauté d’Afrique de l’Est qui est d’ailleurs en train de déployer ses troupes au Congo, tient à les ramener à l’ordre du jour. Initialement, ces nouvelles assises devraient reprendre le mercredi 16 novembre prochain. Mais dans une communication le dimanche 13 novembre dernier sur Twitter, l’EAC a tenu à indiquer que la date du 21 novembre est celle qui a été retenue, soit une semaine après la date qui était fixée.
« La prochaine session du dialogue de paix sur la situation dans l’est de la République démocratique du Congo est prévue, pour commencer, le 21 novembre à Nairobi », a-t-on lu.
Uhuru Kenyatta, facilitateur désigné par la Communauté d’Afrique de l’Est (EAC) dans le processus de Nairobi pour la paix et la sécurité à l’est du Congo est à Kinshasa depuis le dimanche dernier. L’ancien président kenyan s’est proposé de consulter une cinquantaine d’acteurs politiques, sociaux et des forces vives sur la question. Le même dimanche, il a longuement échangé avec Félix Tshisekedi.
Mais, ces pourparlers pourraient commencer alors que sur le terrain des affrontements, dans l’est, le M23, groupe armé soutenu par le Rwanda et l’Ouganda, continue de monter les enchères. Ayant participé au dialogue de Nairobi I, car celui qui devra s’ouvrir est considéré comme un Nairobi III, cette rébellion avait été récusée par la partie congolaise après qu’elle venait de s’emparer de Bunagana, une cité congolaise, frontalière avec l’Ouganda.
Très vite, au regard de ses agissements, Kinshasa ne tardera pas à la considérer comme un groupe terroriste, excluant ainsi toute possibilité de mener de négociations avec elle. D’ailleurs, le soutien de Kigali au M23 n’avait été qu’un autre élément supplémentaire qui avait fait déborder le vase, le gouvernement congolais ayant désormais considéré le groupe rebelle comme étant plutôt rwandais, pas congolais.
La question qui taraude les esprits réside dans le fait que nombre d’observateurs s’interrogent sur l’attitude que prendra Kinshasa. Il y a peu, Patrick Muyaya, porte-parole du gouvernement, a laissé entendre que la RDC était en train d’être forcée à négocier avec les groupes armés. De sa déclaration, on est en droit de déduire que la démarche de la Communauté d’Afrique de l’Est n’a pas convaincu Kinshasa qui se plaint qu’on lui force la main. Bien entendu que le M23, qualifié de terroriste, pourrait être de la partie lors de ce dialogue. Et, c’est effectivement ici où se trouve tout le dilemme. La RDC va-t-elle finalement accepter de se retrouver sur une même table avec des terroristes ? On l’ignore encore.
Toutefois, si le Congo y est obligé comme l’a sous-entendu le ministre de la communication, le gouvernement congolais pourrait ne pas avoir de choix. Pas seulement à cause de la pesanteur de l’EAC mais également compte tenu de l’évolution de la situation au Nord-Kivu. De nos jours, alors que le M23 détient toujours les cités de Bunagana, Kiwanja et Rutshuru-centre, des affrontements sont presque déjà à la porte de Goma, chef-lieu de la province.
L’ennemi espère peut-être avancer plus loin, prendre de nouvelles localités, cités et villes et obtenir plus d’arguments à faire valoir lors des assises si elles ont lieu. A ce stade, on s’interroge tout de même sur les vraies motivations du décalage de la date du début des pourparlers. A moins de se tromper, on redoute que l’EAC qui tient fermement au dialogue entre Kinshasa et les groupes armés soit en train de jouer le jeu de l’agresseur : alors que le M23 progresse, la Communauté d’Afrique de l’Est n’est-elle pas en train de lui donner assez de temps pour qu’il prenne la stratégique ville de Goma, par exemple, afin que le gouvernement congolais se retrouve devant un fait accompli, celui de négocier sans hésiter? Dans ce cas de figure, les pays membres de l’EAC ne sont-ils pas en train de souffler le chaud et le froid ?
On risquerait de développer cette hypothèse dans la mesure où, la même organisation sous-régionale qui est en train de mobiliser ses troupes pour venir combattre tous les ennemis de la paix, s’évertue à ramener les parties prenantes au dialogue contre la volonté de Kinshasa. Pourtant, lors de derniers sommets de Nairobi, les chefs d’Etat avaient promis une réaction militaire contre tous les animateurs des rébellions qui s’entêteraient. N’est-ce pas le moment de sévir si toute cette démarche était sérieuse ? Plusieurs questions méritent d’être posées sur le vrai visage des pays de la sous-région qui bénéficient d’ailleurs du bradage des ressources naturelles congolaises. A suivre…