Par Charles Mapinduzi
Depuis décembre 2020, Joseph Kabila et Félix Tshisekedi ne se sont plus revus. Après avoir cheminé ensemble depuis le 19 janvier 2019, les 2 personnalités se sont tourné le dos après que le nouveau dirigeant congolais a décidé de mettre unilatéralement fin au duel qui les unissait. Depuis, les 2 leaders n’ont plus respiré une même odeur de sainteté, le premier s’étant engagé au sein de l’opposition contre le second.
Sans vouloir le rappeler, en mettant en place une nouvelle coalition gouvernementale, l’Union sacrée pour la nation, en fin 2020, Félix Tshisekedi avait accusé les Kabilistes de lui mettre des bâtons dans les roues et de bloquer son action gouvernementale. A ce temps là, des Congolais se plaignaient déjà de la façon dont le pays était dirigé et soupçonnaient les caciques de l’ancien régime -qui étaient majoritaires au sein de l’équipe gouvernementale – d’être à la manœuvre pour boutiquer l’action du nouveau président.
Cependant, plus de 2 ans après la rupture, les tares décriées lors de la coalition FCC-CACH demeurent toujours au vif. L’Union sacrée constituée par Félix Tshisekedi n’est toujours pas parvenue à se démarquer de la gouvernance précédente : l’insécurité dans l’est s’est accrue, les détournements des fonds ne se sont guère arrêtés, l’impunité, la megestion, le trafic d’influence, la corruption, etc. demeurent des fléaux dénoncés dans plusieurs secteurs de la vie nationale en partant du haut sommet des institutions. Très récemment, à Mbuji-Mayi, le chef de l’Etat congolais en personne a dit sa déception au sujet du retard observé dans la construction de l’Université officielle de Mbuji-Mayi alors que plus de 40 millions de dollars américains avaient déjà été décaissés pour la circonstance.
Alors que les élections auxquelles Félix Tshisekedi compte prendre part en tant que candidat président de la République approchent mais que beaucoup de choses restent encore à faire, des membres de la mouvance au pouvoir accusent le régime passé. Pour eux, le pays a tellement été engouffré par les 18 ans de Kabila qu’il ne sera pas facile à reconstruire en si peu de temps.
Il y a un temps, Félix Tshisekedi lui-même avait déjà prévenu que le pays était déjà mort : “Naye pona ko boma mbok’oyo te, d’ailleurs, eloko ya koboma eza lisusu te mpo esi ekufa” (Je ne suis pas venu détruire ce pays. D’ailleurs, il n’y a même plus à détruire, car il a déjà été détruit depuis longtemps), affirmait-il.
De son côté, un membre de l’UDPS pointe directement Kabila et sa gouvernance. Pour lui, c’est la mauvaise gestion du régime précédent qui rend la vie difficile à l’actuel dirigeant.
“Félix Tshisekedi subit les conséquences de la mégestion de son prédécesseur. Heureusement, il est à la recherche permanente des solutions“, sous-entend-il.
Par ailleurs, pour tenter de convaincre pourquoi il est resté au gouvernement malgré le départ d’Ensemble pour la République, Christophe Lutundula, ministre des affaires étrangères, a lâché :
“Le Président Félix Tshisekedi a mené de grandes actions sur le plan économique et social, ainsi qu’en matière de démocratie et d’état de droit. Nous sommes à l’aise. Les Congolais savent dans quel état nous avons trouvé ce pays et quelle est la guerre que nous menons aujourd’hui. Le vrai problème, c’est que ceux qui ont gouverné la RDC dans le passé n’ont pas travaillé à doter le pays d’une armée républicaine et dissuasive. Reconstruire ce pays qui a été détruit par tous les régimes précédents, cela ne sera pas une affaire de deux mandats“, dit-il.
En un mot comme en mille, Joseph Kabila est parti mais son spectre continue de planer sur la gouvernance de Tshisekedi. De nombreux ratés du régime actuel sont à tord ou à raison attribués à l’ancien président alors qu’en se détachant du FCC, le chef de l’Etat voulait s’attribuer l’entièreté du pouvoir afin d’agir librement. Deux ans après, des membres de la coalition au pouvoir continuent de voir Kabila dans leurs actions.