Par Charles Mapinduzi
Dans moins d’un an, la République démocratique du Congo sera résolument engagée dans un nouveau tournant décisif, celui du choix de nouveaux dirigeants après des élections contestées de décembre 2018. Félix Tshisekedi, le président sortant, sera candidat à sa propre succession.
Mais face à lui, une opposition compacte n’arrête de se constituer. Même si les signaux ne sont encore tels, il se pourrait que Kabila, Katumbi, Matata, Fayulu, Mukwege, Muzito, Sessanga, Kabund se liguent pour déboulonner le régime en place. Ces figures, en plus de nombreuses autres, sont celles qui détiennent le gros du pouvoir à faire un président. Résister à eux sans passer par la fraude et la magouille électorale est simplement inimaginable.
Cependant, Félix Tshisekedi est là. Il doit faire avec. Nombreux qui l’entourent ne l’aident malheureusement à remporter les scrutins. Ils préfèrent plutôt lui soutirer des sous qui leur permettront de faire eux-mêmes leur propre campagne le moment venu. Nombreux d’entre eux ne sont même pas leaders dans leurs fiefs. Certains n’ont même pas réussi à se faire élire comme député où sénateur dans leur propre base : des personnalités sur qui on ne peut donc pas compter.
Ce qui sous-entend que la tâche sera bien rude pour le président congolais qui attend défendre son bilan alors que les cris plaintifs du peuple n’arrête de croître. La dernière démonstration au stade des Martyrs en présence du Pape a été éloquente : le « Fatshi, oyebela, mandat esili (Félix, sois avisé, ton mandat est fini ») n’était pas passé inaperçu, certes.
Toutefois, pour échapper à la sanction populaire, deux grosses options s’offrent à Félix Tshisekedi : d’abord, une fraude électorale massive. Cela implique que le chef de l’Etat mette d’abord et impérativement dans sa poche la Cour constitutionnelle, la CENI et les forces de sécurité. Malheureusement, les résultats d’un tel scénario ne sont pas nécessairement acquis pour la simple raison que le peuple est imprévisible. On peut vouloir tout s’accorder mais la colère populaire peut tout bouleverser et rendre la vie beaucoup plus difficile. Les situations vécues en Afrique du Nord sont plus illustratives à ce sujet.
La seconde possibilité pour Félix Tshisekedi de s’en sortir est le glissement. Joseph Kabila l’a réussi entre 2016 et 2018. Mais, les contextes sont différents. Rien ne pourrait justifier le glissement du calendrier électoral aujourd’hui, si ce n’est que la situation sécuritaire de l’Est, avec notamment l’agression rwandaise. Ce schéma serait celui en cours d’exploitation par les stratèges du régime.
En effet, on constate que sur le terrain, rien de plus particulier n’est en train d’être fait pour reconquérir les espaces contrôlés par le M23. Au contraire, la rébellion avance et s’empare davantage des localités. L’armée semble en pause. Pendant ce temps, Kinshasa n’envisage aucune négociation avec l’agresseur qu’il considère comme terroriste.
Pour nombre d’observateurs, Félix Tshisekedi jouerait avec le temps en permettant que la situation s’enlise, que le M23 gagne davantage afin d’empêcher l’enrôlement des électeurs et ainsi l’organisation des élections. C’est alors que la possibilité de négocier sera mise sur la table.
« C’est son seul billet pour le glissement. Il sait qu’il ne tiendra pas le délai constitutionnel, il doute peut-être aussi de sa réélection et il ne supporta pas la pression des Occidentaux », écrit un analyste.
Mais, sans inventer des intentions, le pays attend voir le président à l’œuvre. Dans ses récents discours, il a promis que le cap vers les élections est irréversible. Donc, attendons voir.