Par Charles Mapinduzi
Depuis les expéditions européennes du 15e siècle, puis le partage de l’Afrique en 1885 à l’issue de la conférence de Berlin, la géante République démocratique du Congo est restée au centre des convoitises mondiales. En effet, le pays continent est bourré d’immenses matières précieuses aujourd’hui impliquées dans l’explosion technologique qui transforme le monde. Ses forêts qui caracolent en tête après l’Amazonie sont aujourd’hui un espoir incontournable dans la lutte contre le réchauffement climatique. Ainsi, du réveil de son profond sommeil, le Congo Kinshasa peut tout à coup changer la donne.
Mais à côté, c’est un paradoxe douloureux et désolant. La RDC, pays de tous les espoirs, est le carrefour de toutes les misères. La vie n’y est jamais sacrée, tant des humains y sont fauchés au gré des vagues : des agressions étrangères par ici, des guerres de rébellion par là ou encore la criminalité urbaine et des assassinats ciblés par ailleurs. Après les sempiternels carnages des civils par les ADF à Beni et dans l’Ituri, ou encore ces incessants massacres entretenus par les CODECO, FRPI, FPIC dans la même région de l’Ituri, d’ignominieuses atrocités sont notées à Kwamouth et à Rutshuru ces jours.
Le sang de plus de 120 Congolais a été versé en seulement 2 jours, le mardi et le mercredi dernier à Kashishi, en territoire de Rutshuru (Nord-Kivu) à la suite d’une exécution ciblée des rebelles du M23 appuyés par le Rwanda. Plus de 20 autres civils ont également été fauchés dans la même contrée le weekend dernier. Aussi, 12 autres personnes ont trouvé la mort dans la commune rurale de Maluku, en ville de Kinshasa. Le 79e conseil des ministres tenu le vendredi 2 décembre dernier a pointé un doigt accusateur des assaillants venus de Kwamouth, dans le Mai-ndombe où ils ont déjà tué des centaines d’autres compatriotes.
Curieusement, toutes ces victimes sont comptées sous l’oeil impuissant, complice ou complaisant des dirigeants du monde. La Communauté internationale, les défenseurs des droits humains et même les autorités congolaises restent parfois ou même très souvent bouches-bées face à ces horreurs. Actuellement au Congo, l’espérance de vie n’est maintenant que de 24h. Ceux qui réussissent à survivre à une attaque aujourd’hui, n’espèrent pas échapper à un assassinat ciblé le lendemain. La vie ne tient finalement qu’à un fil au pays. Dans les régions les plus instables, la situation est beaucoup plus alarmante : de dizaines de civils périssent au moins chaque jour sans que cela ne fasse écho.
Quand il s’agit d’autres nations du monde, la Terre entière est unanime pour condamner, secouer et agir. Quand il s’agit d’une catégorie de victimes, l’humanité rugit. Mais, des populations congolaises sont laissées-pour-compte comme s’il s’agissait de sous-hommes. On est aujourd’hui en droit de se demander si les vies se valent réellement ou s’il y a des humains qui sont plus humains. Le monde applique le 2 poids, 2 mesures face à la sacralité de la vie. Pire, le gouvernement congolais est souvent impliqué dans la danse.
Par exemple, après le massacre odieux des citoyens à Kishishe par le M23, les autorités de la République ont décrété 3 jours de deuil et ont ordonné une enquête nationale et internationale afin d’établir la lumière sur ce drame. Même si cela n’est pas encore suffisant et que Kinshasa doit faire mieux pour agir, un certain nombre d’observateurs se demandent pourquoi la mobilisation n’a jamais été telle pour ce qui est de Beni et de l’Ituri. Pour l’agression rwandaise à Rutshuru, le gouvernement congolais a semblé prendre les choses au sérieux alors que contre l’ADF, l’action des dirigeants est quasi inexistante. Les vies se valent-elles vraiment en RDC, peut-on s’interroger