Par Charles Mapinduzi
Les Mobutistes et les Kabilistes en savent quelque chose ou plutôt, en savent beaucoup. Les Tshisekedistes devraient aussi le savoir. Il reste évident que le pouvoir enivre. Il reste également vrai que c’est seuls ceux qui n’ont jamais été au pouvoir qui disent que le pouvoir n’est pas plaisant. Mais, il n’y a pas de régimes éternels, aussi puissants soient-ils. Il n’y en a jamais eu, devrait-on se rappeler toujours.
Mais, en République démocratique du Congo, des personnalités qui se sont succédé au sein des institutions ces dernières décennies ont donné l’impression, au cours de leur gouvernance, que la République leur appartenait déjà et que leurs compatriotes ne devraient pas avoir droit aux chapitres. Cependant, le cours des évènements a aussi vite prouvé que tout est vanité, que tout passe, que tout coule et que rien ne demeure, comme le dirait le philosophe grec Héraclite d’Éphèse.
Ayant combattu pendant près de 40 ans au sein de l’opposition, les militants du parti UDPS ont accédé au pouvoir dans la douleur en janvier 2019. Peu avant de prendre les rênes du pays, ils ont été des donneurs de leçons sur la façon dont la RDC devrait être gouvernée autrement. Dans l’opposition, ils savaient ce que représentait un État de droit ainsi que le slogan le peuple d’abord.
Malheureusement, 4 ans seulement après, le Congo vit tout le contraire de ce qui a été prôné par le plus vieux parti d’opposition du pays : l’enrichissement illicite et personnel s’est installé, la corruption fait son chemin, la mauvaise gouvernance, les détournements en très grande échelle de sorte que des individus se sont plus enrichis que la République elle-même. Le peuple est totalement oublié à l’autel de ceux qui pensent d’abord à leurs « ventres et à leurs bas-ventres » : ils ignorent ou font semblant d’ignorer que les régimes passent.
Sur un autre chapître, c’est l’intolérance jamais vécue. Sous le régime Tshisekedi, comme jamais auparavant, tout Congolais qui exprime librement une opinion qui s’écarte de la vision défendue par le pouvoir est directement livré à la vendatta populaire. Des militants des parlements debout, sans être interpellés ni inquiétés par la justice, s’en prennent sans gans à des personnalités jusqu’à toucher à leurs intimités. Le cas le plus en vogue aujourd’hui tourne autour de la loi Tshiani sur la congolité. Des Congolais qui ont « commis le péché » de naître d’un des parents non Congolais subissent des pluies de critiques sans merci : les tenants du pouvoir ignorent ou font semblant d’ignorer que les régimes passent.
Au pays, le tribalisme, la ségrégation, le racisme se sont installés au vu et au su des décideurs. Ceux qui bénéficient des avantages de la République sont minoritaires au détriment de la grande majorité des Congolais. Ceux qui sont venus de l’opposition il y a 4 ans ont quasiment tout oublié. Peut-être même qu’ils en moquent. Ils feignent d’ignorer que les régimes passent.
Pourtant, le régime Kabila devrait être une leçon parlante. 18 ans durant, les animateurs des institutions ont agi comme sur un terrain conquis jusqu’à ce que décembre 2018 arrive. Aujourd’hui, ceux qui dictaient la marche à suivre au pays, ceux qui avaient en leurs mains le droit à la vie ou à la mort à tout citoyen se sont retranchés dans l’isolement que personne n’aurait imaginé il y a 4 ans : ils ne peuvent plus se mouvoir librement et ne peuvent rien décider.
A un moins d’un an de la prochaine présidentielle, les combattants du parti au pouvoir, y compris tous les caciques du régime devraient se rappeler. Tout comme Shadari a perdu en 2018 en dépit de tous les moyens politiques, financiers, sécuritaires dont disposait le régime Kabila, Félix Tshisekedi peut également perdre, rien n’étant gagné d’avance. Ainsi, figurez-vous que ceux qui se sont appropriés la République aujourd’hui perdent aux scrutins à venir, qu’ils retombent dans l’opposition et que le pays passe entre les mains d’autres décideurs ! Car, en effet, tous les schémas sont envisageables. C’est donc ici que dans tous ses agissements, la mouvance au pouvoir devrait toujours se rappeler que les régimes passent mais que la République, elle, reste toujours.