Par MichelBUTANGAZI
Le temps de la politique n’est pas celui de la gestion des
banques. En annonçant sa proposition de loi sur la congolité narguant que la fonction de président de la République ne peut qu’être réservée qu’aux seuls congolais d’origine, Noël Tshiani, candidat à la dernière élection présidentielle a semé un vent de panique sur toute la classe
politique et toute la communauté nationale. La gestion des banques ne s’accommode pas de l’incertitude qui entoure désormais cette proposition de loi concoctée par les officines politiques bien identifiées, et dont le sort serait suspendu à un verdict populaire dans les jours qui
viennent.« Comme le peuple ne le veut pas, cette loi ne passera pas», a promis un membre de la société civile qui estime que cette proposition de loi risquerait de plonger le pays dans le chaos.
Une loi qui menace la paix sociale
La décision de Tshiani de multiplier des sorties médiatiques
sur cette problématique a provoqué l’étonnement et le ressentiment des acteurs politiques de tous bords ainsi que de la société civile à l’instar de Georges Kapiamba, coordonnateur de l’Association Congolaise pour
l’Action à la Justice (ACAJ) qui n’a pas eu sa langue en poche pour qualifier d’insensé cette proposition de loi:«Le pays fait face à beaucoup de priorités qui sont plus importantes pour la vie des citoyens que ces genres de débats sur la congolité. Pour nous, c’est vraiment un
débat inutile et insensé pour le moment» tonne-t-il.Certes, en tant que citoyen,Tshiani jouit de tous ses droits et libertés garantis par la constitution, mais sa manière de communiquer sur cette loi frise la haine et l’atteinte à l’unité nationale. Que justifie le silence de la Haute Autorité
des Médias, instance régulatrice des pratiques et de l’éthique des médias congolais pour mettre en garde les médias qui servent de canal de vulgarisation de cette proposition de loi?
Tshiani serait-il en complicité avec le pouvoir contre Moïse Katumbi en 2023 ?
Et si l’impossible arrivait ? Si d’aventure, cette proposition de loi passe le cap de l’Assemblée Nationale,à laquelle elle peut être soumise à un examen par les députés nationaux, et de la survie politique de son initiateur (TSHIANI),ce sont des millions de dollars et voire même de la menace
de dissolution dont devra faire montre le régime de Tshisekedi pour contraindre les élus nationaux à voter de justesse pour cette loi suicidaire. Est-ce un sens de responsabilité ou un sacrifice suprême?
Hors du commun et niet à la manipulation dont devra faire le peuple congolais pour activer l’article 64 de la constitution qui stipule:«Tout congolais a le devoir de faire échec à tout individu ou un groupe d’individus qui prend le pouvoir par la force ou qui l’exerce en violation des
dispositions de la constitution». Pour le peuple, la proposition de loi de Noël Tshiani est à éviter pour maintenir la cohésion nationale. Dans le cas échéant, confronté à la sanction de la rue, cette loi dirigerait la République Démocratique du Congo vers un chaos indescriptible. Mais
aujourd’hui, quel est ce congolais qui croît sérieusement en cette loi xenophobe?
Même système, mêmes pratiques
De Mobutu à Mzee Kabila en passant par Joseph Kabila, la
congolité se retrouve une nouvelle fois sous l’ère Tshisekedi au cœur du débat politique en RD Congo, et dans son viseur, Noël Tshiani ne jure que sur Moïse Katumbi, l’un des potentiels candidats aux élections de 2023.Qui serait alors le maître à penser de Noël Tshiani? Pendant ce temps, à la Présidence de la République, il se chuchote que cet ancien
gouverneur et richissime Katangais ne peut pas être candidat à une même élection avec Tshisekedi. De quoi a-t-on peur?
En attendant, depuis son Katanga natal, Moïse Katumbise
trouve dans la tourmente et est la risée de ses partenaires de l’Union Sacrée de la Nation réunis à Kinshasa et qui fignolent des stratagèmes pour l’écarter de la présidentielle de 2023.Champion de la congolité et l’homme qui fait les show-buzz politique, Noël Tshiani affirme qu’en RDC,
tout candidat au fauteuil présidentiel doit être de père et de mère congolais. Cette lecture erronée de l’article 72 (qui, en fait, établit que le président de la République doit «posséder la nationalité congolaise d’origine»), l’article 10 énonçant qu’«est congolais d’origine, toute personne appartenant aux groupes ethniques dont les personnes et le territoire constituaient ce qui est devenu le Congo (présentement la
République Démocratique du Congo) à l’indépendance», leur permettait d’écarter tout candidat à la magistrature suprême qui n’aurait pas pu, par un test ADN si nécessaire, prouver son identité congolaise «pure laine». En remettant en cause la pureté identitaire de Moïse Katumbi c’est-à-dire son authenticité congolaise, sa congolité et son attachement au pays, Noël Tshiani et ses partisans trafiquent de faux comptes sur les réseaux sociaux pour dissimuler la vérité et nier à Katumbi le droit
même d’accéder au poste de Président de la République.
Cette proposition de loi Tshiani se ferait-elle en échange du gouvernorat de la Banque Centrale?
Un show-Buzz politique qui discrédite Tshiani
Malgré ses sombres cartes politiques pour flatter le Président Tshisekedi à faire de lui gouverneur de la Banque Centrale du Congo, il y a, paradoxalement, quelque chose de bassesse, voire d’incongruité politique dans ce nouveau rebondissement sur la congolité de Tshiani.
Pluie d’interventions médiatiques, fussent-elles inopportunes, donne le sentiment d’être devant un sbire qui se livre à des insultes et des propos xenophobes traitant même Jean-Claude Muyambo (prochede Moïse
Katumbi), de battard, plus est devenu impossible pour le peuple congolais de faire confiance à ce prétentieux de la Banque Mondiale et du Fonds Monétaire International,comme il se fait valoir.Qu’a-t-il fait de
concret pour la République Démocratique du Congo qu’il prétend défendre?
De l’ivoirité à la congolité
Avec cette proposition de loi Tshiani, la congolité a fait florès dans les discours et les médias.S’il est impossible de désigner avec certitude l’inventeur de ce concept flou, son inspiration est à chercher du côté de l' »ivoirité », forgée en Côte d’Ivoire par des intellectuels proches de l’ex-président Henri Konan Bédié. Il s’agissait de réserver aux « Ivoiriens de souche » des préférences dans les emplois ou les élections.
Moyennant quoi l’ivoirité a été le ferment d’une vague de xénophobie sans précédent en Côte d’Ivoire.
En comparaison, si l’on y prend pas garde, la « congolité » de Tshiani qui ne vise que Moïse Katumbi risque de
plonger le pays dans une implosion incalculable. A deux ans des élections présidentielles, Noël Tshiani serait-il le poker politique de Félix Tshisekedi? Bien qu’il ait été le leitmotiv de la campagne électorale, le discours sur la congolité suscite par Tshiani ne serait exploité que pour des fins politiciennes. Ce peut-être plus qu’une bombe à retardement qui va certainement exploser.